Relégué pour la quatrième fois de son histoire professionnelle, le SCO parviendra-t-il à remonter immédiatement une quatrième fois ? Il ne part plus favori. D'une part, l'adversité s'est encore accrue, avec Rouen et Rennes qui renaissent, Noeux-les-Mines qui a seulement échoué en barrages, ou encore les ambitieux promus Mulhouse et le Stade Français (auteur de quatre montées successives !). D'autre part, la situation financière du club angevin est notoirement délicate. Elle a nécessité les départs massifs aussi bien de titulaires aguerris (Baltimore, Cappadona, Gonfalone, Janin, Lecornu) que de jeunes prometteurs (Bosser, Monczuk). Elie Fruchart passe manager général, évolution logique dans sa carrière, et René Cédolin, 51 ans, arrive de Guingamp pour lui succéder.
Pierre Bourdel, chargé du recrutement, a sélectionné des joueurs expérimentés et pas trop chers : l'attaquant Claude Arribas, 30 ans, le fils de José Arribas sous les ordres de qui il fut champion de France en 1973, et l'arrière Joël Delpierre, 29 ans, un ancien international amateur qui a fait toute sa carrière en Lorraine. Deux attaquants stagiaires sont également recrutés : le Martiniquais Jules Eustache, 25 ans formé à l'I.N.F. de Vichy et nanti de quelques années de D2, et un jeune Breton de 18 ans, Hervé Guégan. Enfin, dans un contexte agité, la filière polonaise continue de fonctionner, nonobstant l'affaire " Wienczerk " : Tadeusz Narbutowicz, un attaquant international de 29 ans arrive de Sosnowiec tandis que Zbigniew (prononcer " zbig-nief ") Seweryn, milieu de terrain de 33 ans, un ancien du même club, vient de Tours.
Les trois premiers matches ne sont pas concluants. Narbutowicz n'est pas opérationnel, Bousdira pas disponible et Delpierre se blesse dès la rencontre d'ouverture. Le SCO ne parvient pas à battre le promu Calais, s'incline à Angoulême puis ne vainc que difficilement Quimper. Le retour de Bousdira et de Seweryn marque un sensible redressement : vainqueur d'Abbeville et de Montluçon, le voici troisième, résultat plus conforme à son standing. L'adversaire de la sixième journée est le Football Club de Mulhouse, éphémère fondateur du championnat professionnel devenu pendant des décennies l'un des meilleurs clubs amateurs de France. Dans la foulée du titre de champion de France de Strasbourg en 1979, un nouvel élan est apparu en Alsace et le club mulhousien revient en D2 avec l'ambition de s'installer durablement au niveau professionnel. A cet effet, il a recruté Jean-Marc Guillou. L'ancien Scoïste, après une première expérience à Nice, a passé deux ans comme entraîneur-joueur au Neuchâtel Xamax, qu'il a placé troisième du championnat suisse. Dans cette sorte de match au sommet, devant près de 6.000 spectateurs, Mulhouse s'impose facilement (2-0) et enterre les illusions angevines.
Après une beau succès 3-0 contre le Stade Français, la situation du SCO se dégrade. Sur le plan sportif, il ne remporte qu'une victoire en dix matches. Les absences d'Avrillon et d'Audrain, devenus militaires et indisponibles tout l'automne, et de Delpierre blessé se font lourdement sentir. Il se fait définitivement distancer par les meilleures équipes et tombe dans le " ventre mou ". Jean-Bouin sonne creux (1.847 spectateurs pour la venue de Châteauroux, 2.771 pour Besançon, 1.679 pour Angoulême, 1.444 pour Abbeville) et la situation financière devient alarmante. Le 13 octobre, les comptes ont été rendus publics. Le SCO a perdu plus d'un million de francs au cours des saisons 1977-78 et 1978-79 et ne s'en remet pas. L'exercice 1979-80, pourtant bon sur le plan sportif, a été à peine bénéficiaire. Le transfert de l'international Lecornu à Nantes à l'inter-saison 1981 a juste permis de payer les salaires de mai et de juin !
Le 24 novembre, la rumeur annonce un dépôt de bilan. Le 30 novembre, le président Dupuis, qui le juge inéluctable, le soumet à l'approbation du conseil d'administration mais plusieurs membres - dont le docteur Kerjean, ancien président de 1970 à 1974 revenu au conseil en mai - s'y opposent : déposer le bilan, ce serait trahir les créanciers, provoquer des licenciements et renoncer à la Première division. Par 11 voix contre 10, le conseil rejette la proposition de Bernard Dupuis. Son prédécesseur Jean Keller estime que " le dépôt de bilan aurait été sage. " Le 4 décembre, Charles-Emile Patoureaux, membre du conseil favorable au dépôt de bilan, rencontre le président du Groupement des clubs professionnels, Jean Sadoul. Le 7 décembre, Bernard Dupuis tire les conséquences de sa mise en minorité et de l'incapacité dans laquelle il est placé de trouver une solution : il quitte la présidence et le bureau démissionne ; Emile Lebaron assure l'intérim.
Le 19 décembre, les Scoïstes se qualifient difficilement au sixième tour de la Coupe de France. Le 21 décembre, Charles-Emile Patoureaux, 59 ans, est élu président. Le 23 décembre, il dépose le bilan. Le 24 décembre, Me Bach est désigné syndic du règlement judiciaire. Le 29 décembre, il décide les licenciements économiques des professionnels Berdoll, Bousdira, Felci et Delpierre, des stagiaires Eustache et Debruyne, et des éducateurs Cédolin et Casties. Ne restent plus que cinq joueurs " pros " : Arribas, Camlann, Chaslerie, Narbutowicz et Seweryn. Le 31 décembre, Fruchart redevient entraîneur et Michlowsky (63 ans) prend en main la réserve.
La reprise le 16 janvier porte un rude coup au SCO ainsi amaigri. Au septième tour de la Coupe de France, il est éliminé par une équipe de rang inférieur pour la deuxième fois en deux ans. L'expulsion de Narbutowicz au bout de dix minutes et un petit but de Gestin à la 64' suffisent au Véloce Vannetais. En trente-deuxième de finale, il sera éliminé par Auxerre tandis que son grand rival l'Union des Clissons et des Korrigans le sera par Concarneau.
Tandis que les licenciés se reclassent comme ils peuvent (Bousdira facilement à Rennes, Felci et Eustache à Alès entraîné par Michel Cassan, Debruyne à Caen entraîné par Alain Laurier, Berdoll plus difficilement à Amiens et Cédolin au centre de formation de Sochaux), Fruchart s'appuie sur les retours d'Audrain et Avrillon, titularise Heyman, Lopez, Guégan, Piniarski et Petiteau, et lance Lecouvreur. Fort logiquement, les résultats de cette jeune équipe sont en dents de scie. Il bat le Stade 3-0 en suscitant des espoirs, ainsi que Limoges 5-0 mais perd parfois lourdement comme à Rouen (0-3) ou à Mulhouse (0-4) que l'entraîneur-joueur Guillou mène à la Première division ! Narbutowicz, stérile depuis le début de saison, marque cinq fois en cinq matches avec un doublé contre Limoges.
Le SCO achève le championnat par une navrante défaite 3-0 à Calais qui est pourtant relégué, et finit huitième très loin derrière les meilleurs. Puis il dispute une coupe d'été sans intérêt dans l'indifférence générale. C'est l'été 1982. Tous les esprits sont déjà tournés vers l'Espagne : Bilbao, Valladolid, Madrid, Séville.
Départs : Baltimore (Montpellier), Bosser (Montluçon), Cappadona (Nice), Cédolin (entr., Guingamp), Gonfalone (Auxerre), Iddir (Gazélec), Janin (Gueugnon), Larvaron (Valenciennes), Lecornu (Nantes), Monczuk (Rouen)
Arrivées : Arribas (Cannes), Delpierre (Nancy), Eustache (Martigues), Guégan (Quimper), Narbutowicz (Sosnowiec, Pologne), Seweryn (Tours)
Effectif : Arribas, Audrain, Avrillon, Berdoll, Bousdira, Camlann, Charrier, Chaslerie, Debruyne, Delpierre, Diecket, Eustache, Felci, Guégan, Heyman, Lecouvreur, Lopez, Narbutowicz, Petiteau, Piniarski, Seweryn - Entr. Cédolin puis Fruchart
© Olivier Moreau 2005