Site SCO1919
Forum SCO1919

Déroulé de la saison 1967/68

La saison

18ème en championnat de France de Première division professionnelle.
1/8 finale de la Coupe de France.

Fort de son excellent parcours de la saison précédente, le SCO conserve un effectif quasi inchangé. Les seuls mouvements touchent Pottier qui retourne en Suisse, Yvan Roy qui arrive de Sedan et l'amateur Prandin qui vient de la banlieue parisienne. Bien rôdée, sûre d'elle, l'équipe du SCO a fière allure. Elle peut viser très haut, il ne lui reste plus qu'à vaincre les Stéphanois et autres Nantais pour cela. Et si sa cote est élevée, elle le justifie d'entrée, le 20 août 1967. Devant près de 7.000 spectateurs, Rouen est vaincu 3 à 0. C'est un événement car, pour la première fois de son histoire, le SCO est en tête du championnat de France professionnel ! La semaine suivante, Aix-en-Provence subit sa première défaite à domicile en D1 : le SCO rentre à nouveau trois buts par Dogliani, Stiévenard et Margottin. Le SCO semble irrésistible : lors de la troisième journée, le même Margottin réussit le coup du chapeau tandis que la défense ajaccienne reste muette. Les 12.888 spectateurs de Bessonneau sont aux anges. Trois matches, trois vicoires, neuf buts marqués, un seul encaissé : la défense est imperméable et l'attaque fait merveille. Décidément, le SCO s'affirme comme un très sérieux postulant au titre.
Et puis l'incroyable survient et le cauchemar commence. Ça se passe à Gerland. C'est comme un déclic, mais à l'inverse des saisons passées. Le SCO sombre totalement. Bien sûr, le gardien Voloviec joue blessé aux côtes. Mais cela peut-il expliquer que le leader s'écroule et soit balayé 8 à 0 ? Cette catastrophe, le SCO ne s'en remettra jamais. Oh ! ce n'est pas tellement qu'il subisse d'autres humiliations (on ne relèvera guère que trois autres lourdes défaites : 4-0 à Ajaccio, 5-0 à Monaco et 5-1 à Strasbourg) mais il gagne bien trop peu : 7 victoires en 32 matches. L'attaque reste assez performante (a-t-on jamais vu un rélégué pourvu de la quatrième force de frappe ?) mais la défense est beaucoup trop fragile. Si on met de côté le cas d'Aix-en-Provence dont la présence en D1 tient presque de l'accident, elle s'avère de loin la plus mauvaise. Et il est évident que la blessure de Dogliani qui prive le SCO de son meneur de jeu pendant la moitié de la saison n'améliore pas les choses. Le SCO ne coule pas à pic mais il s'enfonce lentement : 5ème après neuf matches, 10ème à mi-parcours, 15ème début mars, 18ème et relégable à la 30ème journée.
En Coupe de France, il tient honorablement son rang. Les amateurs du Stade Briochin sont d'abord écartés 3-1. Puis c'est au tour des Valenciennois d'être éliminés au stade Henri-Jooris à Lille (1-0, but de Stiévenard). L'adversaire en huitième de finale est le pire que les Angevins pouvaient craindre : Saint-Etienne, champion de France en titre et bien parti pour recommencer. Les hommes de Batteux ? Presque que des internationaux : Carnus, Durkovic, Mitoraj, Bosquier, Polny, Jacquet, Herbin, Keita, Revelli, Mekloufi, Bereta. Et si la rencontre n'a attiré que 7.723 spectateurs à Bordeaux, le SCO fait bonne figure. Bereta score à la 35' mais Deloffre égalise à la 55'. Finalement, Keita offre la victoire aux Stéphanois. Ces derniers remporteront la Coupe le 12 mai 1968, peu de jours avant les fameux événements !
Il est bien évident que dans le contexte subversif de ce printemps 1968, le championnat a été suspendu et n'a repris que le 12 juin. Fin juin, à deux journées de la fin, la situation du SCO est grave. Les deux dernières places sont déjà dévolues à Lille et Aix. Le dernier siège éjectable est occupé par le SCO avec 30 points et une très mauvaise différence de buts (-23). Devant, Strasbourg est à 2 points (32, -4), Lens et Rennes à 3 points (33, -11 et -9), le Red Star et Lyon inaccessibles à 4 points (34, +1 et +2). Pour éviter la relégation directe, le SCO doit par conséquent remporter au moins trois points sur les quatre encore en jeu, en espérant que Strasbourg n'en marquera qu'un, ou que soit Lens soit Rennes perdra ses deux dernières rencontres. Quant à éviter les deux places de barragistes, cela relèverait du miracle. Chez des Rouennais qui justement ne sont pas encore à l'abri des barrages, le SCO crée la surprise en s'imposant 1-0 grâce à Poli. Lyon fait match nul, le Red Star est battu à domicile, Lens et Rennes se neutralisent et Strasbourg chute lourdement à Nantes (0-4). Enfin, dans le match des relégués, Aix remporte contre Lille sa première victoire en dix-neuf rencontres : c'est le prochain et dernier adversaire du SCO...
Avant cette journée de clôture, récapitulons : 12ème Lyon (35 points, différence de +2) ; 13ème Rouen (35, 0) ; 14ème Red Star (34, 0) ; 15ème Rennes (34, -9) ; 16ème Lens (34, -11) ; 17ème Strasbourg (32, -8) ; 18ème SCO (32, -22) ; 19ème Lille (26, -17) ; 20ème Aix (20, -39). La seule chance pour le SCO dépend de Nantes : il lui faut vaincre Aix-en-Provence en espérant que Nantes prendra au moins un point à Strasbourg. Avec deux points d'avance et des différences de buts bien meilleures (écarts de +13 et +11), Rennes et Lens sont hors de portée.
Le match décisif entre Aix et le SCO se tient à Bessonneau le vendredi 2 juillet 1968, en nocturne. Le temps est pluvieux et seuls 4.016 spectateurs ont fait le déplacement. Antoine Pasquini sait qu'il dirige son dernier match pour le SCO : son contrat ne sera pas renouvelé. Les Scoïstes ne tardent pas à faire parler la poudre : Chlosta ouvre le score dès la 4' ! C'est un match à sens unique, entre une équipe très faible et une autre survoltée par la volonté de rester en D1. Dogliani (35' et 38') et Poli (44') mettent le SCO à l'abri d'un hypothétique retour des Aixois.
A la mi-temps, les Angevins mènent 4-0 et sont informés de la situation sur les autres stades. Strasbourg a pris l'avantage sur Nantes, il faut espérer que la situation s'inverse en Alsace. Mais un autre espoir, un peu fou, émerge : Saint-Etienne, assuré du titre depuis longtemps, joue le jeu et mène à Lens. Dès lors, le SCO a presque l'assurance de revenir à égalité de point avec les Lensois. Il reste évidemment l'obstacle de la différence de buts par rapport à Lens mais l'écart est déjà passé de -11 à -6. Or les Angevins savent à quel point leur adversaire aixois est friable : en le forçant, il peut exploser ! Et si les Stéphanois continuent à leur niveau habituel, le SCO peut devancer Lens ! C'est donc une équipe angevine prête à tout écraser qui attaque la deuxième mi-temps tambour battant. Tulik marque à la 51'. Dans la foulée, contre-temps : sur un coup-franc anodin, Cossou rentre le premier but aixois : 5-1. Qu'importe, sur l'engagement Dubaële réplique : 6-1. Les Angevins continuent de pousser mais les Provençaux résistent. Poli, enfin, marque à nouveau (7-1, 64'). Sept minutes plus tard, Dubaële réussit à son tour le doublé (8-1). Il reste encore vingt minutes, largement de quoi alourdir l'addition, mais le SCO ne donne peut-être pas tout ce qu'il a. Il faut attendre la fin de match pour assister au dernier but, inscrit par Tulik (9-1, 88').
Le SCO a certes totalisé, mais est-ce suffisant ? Au final, il possède 34 points, une différence de -14 avec 56 buts marqués et 70 encaissés. Le résultat de la Meinau parvient : Strasbourg a battu Nantes 3 à 1, l'espoir s'envole de ce côté. Enfin, on annonce le score de Bollaert : Saint-Etienne a battu Lens 3 à 1, ce qui signifie que les Lensois terminent avec 34 points, une différence de -13 pour 48 buts marqués et 61 encaissés. Autrement dit, le SCO ne perd sa place en D1 que pour un simple petit but : il aurait suffi d'en marquer un supplémentaire ou d'éviter celui des Aixois pour finir avec la même différence du buts que les Lensois et pour les devancer au nombre de buts marqués ! C'est peut-être le reflet de la saison : le SCO avait mille fois les moyens de conserver sa place en D1, et même brillamment mais, excès de suffisance, péché de négligence, préparation physique insuffisante ou simple malchance, il n'a pas donné tout ce qu'il pouvait. La saison 1967-1968 restera donc celle de l'un des plus incroyables loupés de l'histoire du championnat de France. Comment une équipe efficace, expérimentée et si bien partie a-t-elle pu dériver de telle manière ? Il restera toujours une part de mystère dans cette invraisemblable déroute.

Départs : Pottier (Servette, Suisse)

Arrivées : Roy (Sedan), Prandin (Juvisy)

Effectif : Bourdel, Chlosta, Deloffre, Dogliani, Dubaële, Edwige, Gallina, Grobarcik, Guillou, Margottin, Mouilleron, Perreau, Poli, Prandin, Roy, Stiévenard, Tulik, Voloviec
© Olivier Moreau 2003